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Et le cépage le plus planté en Bretagne est…

Suspense. C’est LA question la plus souvent posée concernant les vignobles émergents, comme la Bretagne, par exemple. Réponse : ce que veulent les vignerons (et spoiler : c’est moins audacieux que ce que vous pensez).

Dans les vignobles émergents (Bretagne, Hauts de France, Normandie…), les vignerons sont libres de planter les cépages de leur choix. Ces territoires se démarquent justement par l’absence de cadres : pas d’appellation (AOP ou IGP), pas de traditions, pas d’attentes particulières. Les pros ont donc l’entièreté du catalogue des cépages français (environ 400 cépages) à leur disposition. Ça peut sembler intimidant… Mais pour les professionnels qui s’installent là plutôt que dans un vignoble établi, c’est justement cette « page blanche » qui les attire.

 

Plantations de vignes à Belle-Ile-enn-Mer, Bretagne 

Le top 10 des cépages les plus plantés en Bretagne

 

  • Chardonnay (35% des surfaces plantées)
  • Chenin (11%)
  • Pinot noir (10%)
  • Savagnin
  • Johanniter
  • Cabernet franc
  • Gamay
  • Soreli
  • Pinot gris
  • Sauvignon gris

Les autres cépages plantés en Bretagne administrative : floréal, solaris, vidoc, viognier, alva, grolleau blanc et gris, pinot meunier, gewurztraminer, muscaris, syrah, pinotin, voltis, sauvignac, folle blanche, pineau d’Aunis, pinot blanc, melon, abouriou, muscat de Hambourg, sauvignon, riesling, souvignier gris, carignan, tempranillo, oberlin, romorantin, cot, pinot auxerrois, etc.

(Source : services de la Douane de Nantes, fin 2023)

 

Sur quels critères repose le choix des cépages dans les nouveaux vignobles ?

 

→ Le terroir, et bien évidemment le climat. La clé de la réussite, vous diront tous les experts, c’est de choisir un cépage adapté au terroir. Puisque les vignobles émergent dans le Nord de la France, les cépages tardifs ou très sensibles à la maladie (au mildiou) sont à éviter. Les cépages versatiles, pouvant être vinifiés en effervescents en cas de maturité faible, par exemple, sont particulièrement adaptés. Les cépages « rouges » seront parfois difficiles à cultiver. La clé : l’adaptabilité.

💡 En Bretagne, la géographe Valérie Bonnardot (Université de Rennes 2) étudie de près la santé des cépages plantés, millésime par millésime. Un réseau de sondes climatiques dans les vignobles permet d’alimenter la connaissance sur les potentiels – et les limites- de chaque cépage.

 

→ Les réalités commerciales. Parce qu’il faudra bien vendre le vin issu de ces raisins, tout vigneron qui plante de la vigne doit réfléchir aux attentes de ses futurs clients. Avec une question : faut-il privilégier des cépages connus ou, quitte à assumer le caractère résolument nouveau de ses vins, partir sur la voie de l’innovation ? En BZH, clairement les producteurs ont fait le choix du consensuel chardonnay, qui rassurera les buveurs en terre inconnue.

🍇 A noter : en Bretagne, rares sont les producteurs à avoir opté pour l’option « 100% hybrides ». Citons par exemple Aurélien Berthou, à Auray dans le Morbihan, qui a planté soreli, muscaris, fleurtaï et souvignier gris.

 

→ Les envies du producteur. Les vignerons préfèrent en général produire des vins qu’ils aiment boire. Leur encépagement sera aussi le reflet de leurs goûts et de leur parcours. Ainsi, les pros bretons formés en Loire sont nombreux à avoir rapporté le chenin dans leurs bagages… Les cépages du Jura, qui a la cote en ce moment, s’installent en Bretagne, à commencer par le savagnin.

🍷 Parmi les cépages inattendus, on peut déjà croiser en Bretagne du viognier (en Côtes d’Amor) ou de la syrah (à Belle-Ile). Sur des petites surfaces, mais quand même…

 

Et pourquoi pas le melon ?

Malgré son nom, le melon « de Bourgogne », cépage du muscadet, produit en Loire-Atlantique dans le vignoble nantais, peut apparaître comme LE cépage breton par excellence. Mais très peu de vignerons en ont planté en Bretagne administrative, pour l’instant.

Plusieurs raisons sont avancées : d’abord parce que c’est un cépage compliqué à cultiver, sensible au mildiou et assez peu productif. Ensuite parce qu’il ne correspond pas au goût des producteurs qui s’installent. Enfin parce que tout laisse penser que les vignerons nantais verraient d’un mauvais œil l’émergence à leurs portes d’un vignoble marchant sur leurs plates-bandes. Les vignerons d’Ile-de-France l’avaient appris à leurs dépens : le melon est la chasse-gardée du vignoble nantais, et a été rayé de la liste des cépages autorisés dans le cahier des charges de leur nouvelle IGP, à la demande express des vignerons nantais. Bref : si IGP Bretagne il y a un jour, il est peu probable que le melon y soit listé…

 

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