Michel Tolmer : “J’ai mis le peu d’acharnement que j’ai à organiser ma vie pour produire des images”
Rencontre vinofuturiste. Soit vous vivez dans une grotte sans vin, soit vous connaissez Michel Tolmer, et Mimi, Fifi et Glouglou. Le 4e opus de la trilogie qui raconte leurs péripéties et réflexions vinesques vient de sortir aux éditions de l’Epure, pour notre plus grand plaisir.
Les Vinofuturistes – 24/11/25 – Propos recueillis par J.R.
Qu’est-ce qu’on peut dire sur votre BD sans passer pour un·e con·ne ?
« Ah, je ne suis pas bon pour ce genre de chose, je ne suis pas un tac au taqueur. On passe. Mais je veux dire quand même que je trouve le livre très beau. C’est grâce au travail de Sabine Bucquet. Les couleurs sont très pimpantes, très jolies. Esthétiquement, je le trouve au top.”
Il existe un vin désalcoolisé aromatisé à l’herbe à chat, pensé pour les animaux de compagnie. Que diraient Mimi, Fifi et Glouglou face à une bouteille comme ça ?
“Ils passeraient à la page suivante. Sans commentaire. C’est une totale perte de temps.”
Le kalimotxo, mélange vin rouge et coca-cola, fête ses 50 ans. Et vous, quel truc bizarre aimez-vous faire avec votre vin ?
“Je balance : une personne proche met des glaçons dans son vin, et je m’en suis inspiré pour une planche, un mec qui déguste du Pomerol et qui demande des glaçons. Il est embarqué par une brigade d’intervention. En ce qui me concerne, si on parle des codes, il est de très bon ton de ne jamais boire de vin seul… Et bien j’avoue que ça m’est arrivé et j’y ai trouvé du plaisir. Voilà ma confession.”
« Je suis un baisseur de bilan carbone, mais en dilettante. »
Des vignerons bordelais ont transformé leur chai, et produisent désormais de la sauce soja. Si vous deviez pivoter, vous aussi, ça serait pour faire quoi ?
“Je ferais retraité. Mais c’est un peu tard pour changer, et j’ai mis le peu d’acharnement que j’ai à organiser ma vie pour produire des images, et à y trouver tout mon plaisir. Donc je ne me vois pas arrêter. Je devrais déjà être retraité, mais je continuerai, de toute façon et je suis trop paresseux pour les trucs administratifs.”
Depuis toutes ces années à écrire et dessiner sur le monde du vin… Qu’est-ce qui vous inspire encore ?
“ Il y a peu de marges de lassitude dans le monde du vin. C’est vraiment infini. Ce que je trouve toujours aussi inspirant : la base de tout, c’est la diversité. C’est le mot-clé. C’est un peu un obstacle pour le vin, qui a du mal à se présenter lui-même. C’est un cauchemar pour le marketing : il faudrait trois ou quatre marques repérables, or on a 40000 entreprises familiales. Mais pour moi, c’est ça qui est merveilleux.”
« Le vin naturel est basé sur une envie viscérale, indomptable, irréductible, de liberté. Ce sont des gens qui donnent tous un avis différent dans le débat sur “qu’est-ce que le vin nature”, avec une mécanique de l’opposition systématique. C’est génial et c’est même un ressort comique pour moi. »
Ici, retrouvez toutes les infos sur le livre, publié aux éd. de l’Épure. 96 pages, 24€.
Avec Mimi, Fini et Glouglou, vous vous moquez du monde du vin naturel, de ses manies, de son ridicule, mais avec toujours beaucoup de tendresse… Qu’est-ce qui pourrait vous rendre féroce ?
“Ce n’est pas mon truc, la férocité. C’est plutôt “qui aime bien châtie bien”. Ce que je n’aime pas, ce sont les promesses pas tenues, les vins qui terminent à l’évier parce qu’ils sont bâclés, mais comme ils se réclament de cette qualité suprême d’être des vins naturels, il faudrait les boire quand même. Ça m’agace. Mais d’un autre côté, tout ce que je fais est basé sur mon incapacité, mon doute permanent, et je trouve ça aussi très bien que le vin naturel soit basé sur une envie viscérale, indomptable, irréductible, de liberté. Ce sont des gens qui donnent tous un avis différent dans le débat sur “qu’est-ce que le vin nature”, avec une mécanique de l’opposition systématique. C’est génial et c’est même un ressort comique pour moi.”
Et votre bilan carbone, dans tout ça ?
“Il est… flou. Il manque de résolution. Je suis un baisseur de bilan carbone, mais en dilettante. Mais dans le milieu du vin nat qui est super vertueux, il y a des grosses failles aussi… La circulation du vin n’est pas en circuits courts, et les vignerons sont très contents d’aller à San Francisco ou Tokyo se faire acclamer. Je ne veux pas être dénonciateur, mais ça a un coté un peu désespérant de constater que même quand on essaie de bien faire, on se trompe. Moi même je n’utilise pas mes crayons jusqu’au bout, je les jette à la moitié. Mais j’ai une éditrice très vertueuse : le cauchemar absolu de Sabine est de pilonner un livre, elle ajuste toujours ses quantités à l’imprimerie pour l’éviter. ”
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