#26 Un vignoble du futur sans pesticides, c’est possible ?
Le vignoble actuel est dépendant des pesticides, de synthèse ou naturels > Les pesticides de synthèse empoisonnent l’environnement, les riverains et les travailleurs de la vigne > Le vignoble du futur sera sans pesticides ou ne sera pas > On vous a listé trois alternatives possibles.
Décryptages / septembre 2025 – J.R.

Publiée lundi 15 septembre 2025, l’étude PestiRiv démontre que les riverains des zones viticoles sont plus exposés aux pesticides que la moyenne des Français. On s’en doutait, maintenant, on sait.
Et les vignerons, eux, savent bien que sans pesticides, leur vigne meurt. C’est comme ça depuis l’arrivée du mildiou et de l’oïdium (venus des Etats-Unis) il y a 150 ans. Depuis, les vignerons combattent à chaque printemps ces ennemis increvables (et il y en a d’autres), avec des molécules de synthèse (en conventionnel) ou, pour les bio, du cuivre et du soufre qui causent d’autres sortes de problème.
La facture de cette solution commence tout juste à se présenter à nous, et elle est salée. Evidemment, le vignoble n’est pas le seul acteur de cette cata. Mais vous a-t-on déjà parlé des 12500 points de captage d’eau trop pollués, et qui ont dû être abandonnés POUR TOUJOURS ?
Donc : où sont les solutions ? Spoiler : on n’a pas toutes les réponses, mais il faut bien commencer quelque part.
Quelques pistes pour un vignoble sans pesticides
Les variétés dites “résistantes” : hybrides, Piwi, Resdur…
Elles ont plusieurs noms, plusieurs origines, et il en existe des milliers. Nés d’un croisement entre différentes espèces de vignes, ces “cépages résistants” aux maladies permettraient, selon certaines études, d’économiser jusqu’à 90% de pesticides. Il faut quand même les traiter un peu, pour éviter que les maladies finissent par “contourner” les gènes de résistance. Aujourd’hui, c’est moins de 1% de la surface viticole française.
→ Le hic : les cépages résistants sont mal connus, et leur “résistance” difficile à évaluer dans le temps long. Les pros ont moyennement confiance… Et surtout : les vins produits sont souvent “différents”, et rien ne dit que les consommateurs suivront. Dernier souci : changer de cépages, c’est souvent renoncer à son appellation et ses traditions.
📌 A lire : l’entretien avec Lilian Bauchet “Ce qu’on défend ce ne sont pas les hybrides, mais l’hybridation”
Les produits de “biocontrôle”.
Il s’agit là d’utiliser des mécanismes “naturels”. ‘Ces techniques sont fondées sur les mécanismes et interactions qui régissent les relations entre espèces dans le milieu naturel. Ainsi, le principe du biocontrôle repose sur la gestion des équilibres des populations d’agresseurs plutôt que sur leur éradication”, nous dit le ministère de l’Agriculture. Dans les vignes, ce sont par exemple les phéromones, utilisés pour la confusion sexuelle des insectes, ou une application d’‘argile sur le feuillage au moment T, pour empêcher la ponte de la cicadelle…
→ Le hic : la prévention, ça prend du temps, ça demande d’être dans ses vignes très très souvent, et ça coûte plus cher, pour une efficacité parfois relative. A voir au cas par cas. Autre souci : des problèmes parfois de réglementation + La R&D ne va pas assez vite.
📌 A lire : “Les vignerons se détournent des produits de biocontrôle dont l’efficacité est incertaine”, Vitisphère, juin 2025
Les systèmes de protection physique
On arrive un peu dans le turfu, mais it’s coming : la vigne sous tunnel. Il s’agit de systèmes automatisés, mi storeban / mi-parapluie, qui se déploient sur la vigne en cas d’alerte. C’est surtout conçu pour protéger les ceps du gel ou de la grêle. Cela peut permettre de réguler la température et l’humidité, et donc le risque de maladies. La version la plus poussée, c’est la serre, déjà utilisée par les pépiniéristes pour accélérer la production de plants de vigne.
→ Le hic : ça coûte très cher, ce n’est pas autorisé en appellation (sauf en test, à Bordeaux), et esthétiquement… ça ne va pas plaire à tout le monde.
📌 A lire : Le viti-tunnel bientôt déployé sur les vignes AOC, Vitisphère, janvier 2025
🍇 On ajoute ici une technique qui permet de réduire au moins les quantités de pesticides de synthèse : la conversion en bio. Ça existe depuis plus de 40 ans, plusieurs générations de vignerons ont montré que ça fonctionnait, même si ça reste compliqué. En tout cas, pour les consommateurs, c’est la meilleure garantie qui existe de ne pas retrouver de saletés dans leur vin.
→ Vous ne voulez plus de pesticides ? Consommez bio, soutenez les producteurs engagés.
🧐 Pour les chercheurs, il ne s’agit plus de trouver LA molécule parfaite qui viendra remplacer tel ou tel usage. Ils poussent aujourd’hui vers des solutions “éco-systémiques” : des changements de pratiques et de modèles économiques. Les enjeux sont techniques, bien sûr. Mais ils sont aussi économiques – qui prend en charge la R&D ? comment vit-on de ces nouveaux modèles ?. Et humains : l’acceptabilité des nouvelles pratiques pour les professionnels qui les mettent en oeuvre, c’est quand même la base.
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